Le Festival Cinéma et droits de l’homme* de Toulouse et Région midi Pyrénées a inscrit dans son programme de janvier 2019 une cause très oubliée, celle du peuple sahraoui: 3 soirées avec film et débat autour du documentaire, «Dis-leur que j’existe-une histoire sahraouie» de Manue Mosset, à Toulouse, Lavelanet et Tarbes et aussi une exposition de photos de Maurice Cuquel à «l’Espace diversités et laïcité» de Toulouse intitulée «Retour sur terre» sur les conditions de vie du peuple sahraoui de la République Arabe Sahraouie en exil dans les Campements de réfugiés près de Tindouf dans le Sud Ouest algérien. Les 3 soirées étaient organisées avec le soutien de l’ACAT.
Pour ces événements, une invitée remarquable, Claude Mangin, l’épouse de Naâma Asfari, militant sahraoui pacifique, défenseur des droits humains, emprisonné au Maroc. A l’Espace des diversités, Claude témoigne devant le public présent, représentants des associations, 2 élues de la Mairie de Toulouse et du Conseil régional, ainsi qu’un responsable d’une association sahraouie et de sa famille. Le documentaire a été présenté au cinéma Le Cratère. Antony Jean, photographe et vidéaste originaire de la région était présent. Ses images ont été à l’origine de ce film. Son témoignage a été percutant: Il était présent lors du plus grand rassemblement pacifique de protestation de Gdeim izik installé à 10 km de Laayoune capitale du Sahara occidental occupé par le Maroc. Ce Campement de la dignité a réunit plus de 20 000 Sahraouis dans 8000 tentes en octobre- novembre 2010. Il raconte la lutte de son mari, militant pacifique, emprisonné depuis novembre 2010 avec 23 autres pour un crime qu’ils ne peuvent avoir commis. L’assassinat présumé de 11 membres des forces armées marocaines lors de l’attaque du Camp de Gdeim Izik par l’armée marocaine a eu lieu le lendemain de son arrestation dans une maison d’un ami à Laayoune, le 7 novembre! Ils subissent alors des tortures, sont contraints à des aveux forcés et transférés à la prison de Salé près de Rabat. En 2013, ces 24 civils sont jugés par un tribunal militaire lors un procès inéquitable: Naâma Asfari est condamné à 30 ans de prison et les autres à des peines allant de 20 ans à perpétuité. Après un arrêt de la Cour de cassation marocaine en 2016 un nouveau procès en Appel a eu lieu à Rabat devant une cour civile. Les mêmes peines ont été prononcées après 7 mois de procès sans plus de preuves. A l’issue de ce procès, représailles et vengeance se sont abattues sur le groupe qui a été dispersé dans 7 prisons du royaume en contrevenant au Droit International Humanitaire des Conventions de Genève, le droit de la guerre auquel adhèrent Maroc et Polisario qui stipule qu’ils devraient être incarcérés près de leurs familles en Territoire occupé du Sahara Occidental. Le droit de visite aux familles qui viennent de si loin est très limité ainsi que l’accès aux soins, à la promenade et au téléphone de la prison.
A cause de son engagement, Claude Mangin a elle été interdite de visite pendant 2 ans et demi et vient seulement être autorisée à revoir son mari, à la suite de sa grève de la faim observée durant 30 jours en avril 2018. Naâma Asfari a reçu le prix 2017 des droits de l’homme décerné par la Fondation ACAT pour la dignité humaine en janvier 2018. Le Comité contre la Torture de l’ONU à Genève a condamné le Maroc pour la 1ère fois pour fait de tortures sur Naâma en décembre 2016. Cette condamnation demandait au Maroc de le libérer, de juger ses tortionnaires et de ne pas faire subir de représailles sur lui et sa famille.
Un bref rappel historique: le peuple sahraoui se bat pour sa terre depuis le départ de l’Espagne en 1976 de son ancienne colonie le Rio de Oro, disputée entre le Maroc et la Mauritanie. Une partie de la population a fui les bombardements aériens du Maroc et de son allié français et s’est réfugiée en Algérie où elle vit dans des Campements, dans des conditions très précaires, dans la région désertique de Tindouf. Ces Campements sont sous la responsabilité du HCR -Haut Commissariat aux Réfugiés de l’ONU et sont administrés par le Gouvernement de La RASD-République Arabe Sahraouie Démocratique en exil et le Front Polisario. L’autre partie de ce peuple restée au Sahara Occidental occupé militairement par le Maroc subit persécutions et discriminations de la part de l’administration coloniale, des forces de l’ordre et parfois des colons marocains installés massivement depuis 1976 pour exploiter illégalement les richesses du SO en particulier ressources halieutiques et phosphates. La construction par le Maroc soutenu par les ingénieurs français et israéliens d’un mur de sable de 2700 km, doublé de fossés anti-chars et renforcé par des mines anti-personnels divise le territoire et met en danger les populations et le travail de la mission de la Paix l’ONU, la MINURSO, créée en 1991 lors du cessez le feu signé par le Maroc et le Polisario pour superviser l’organisation d’un référendum d’autodétermination, jamais réalisé. Cependant le Maroc, toujours très lié à la France est sur la sellette, 2 arrêts de la Cour Européenne de Justice en décembre 2016 et février 2018, stipulent que le Sahara ne fait pas partie du Maroc et que les traités d’association pour les produits agricoles et la pêche ne sont pas applicables à ce territoire. Sous pression de l’ONU, le Maroc a accepté récemment de revenir à la table des négociations qui doivent reprendre en mars prochain avec le Polisario pour l’organisation du référendum d’autodétermination promis depuis 1991.
Françoise Laborde
* Le FCDH de Toulouse est organisé depuis 12 ans par un Collectif d’associations: Amnesty International, Les Amis du monde diplomatique, le CCFD-Terre solidaire, l’Ecole des droits de l’homme, Médecins sans frontières et Médecins de monde le coordinateur.
Pour plus d’infos: www.ouiso.eu site de l’Observatoire Universitaire International Sahara Occidental, pour soutenir les Sahraouis, une association: les Amis de la RASD qui organise des missions de Solidarité, l’accueil d’enfants sahraouis des Camps de réfugiés pendant l’été, le parrainage des prisonniers politiques… www.association-des-amis-de-la-rasd.org www.ecrirepourlesliberer.com un facebook Les Amis de la République sahraouie, et le site de l’ACAT www.acatfrance